Conférence du Père Marc Prigent, Brest le 26 novembre 2015

Introduction :

Le thème choisi est au cœur de l'actualité, au confluent de la réflexion (et questions) du Synode, de l'Année sainte de la Miséricorde, et bien sûr, de la récente canonisation des Epoux Martin.

1.Présentation de la famille martin :  

Famille "Disciple et Missionnaire"

Nous connaissons surtout Thérèse, ste Thérèse de l'Enfant Jésus de la Sainte Face, religieuse au Carmel de Lisieux : née à Alençon le 2 janvier 1873, entrée dans la Vie le 30 septembre 1897 à 24 ans. Ses parents Louis Martin (1823-1894) et Zélie Guérin (1831-1877), 2° enfant de Isidore et Louise-Jeanne Guérin. Mentionnons aussi la tante Visitandine au Mans (sœur aînée de Zélie) : 1829-1877. Ses sœurs : Marie (sr Marie du Sacré Coeur), Pauline (Mère Agnès de Jésus), Léonie (sr Françoise- Thérèse), et Céline (sr Geneviève de la sainte Face). Sans oublier Hélène, Joseph-Louis, Joseph-Jean-Baptiste et Mélanie-Thérèse, morts en bas-âge.

Les lieux :

La Normandie,.. Tout d'abord Alençon, puis Lisieux, après la mort de Zélie, afin de se rapprocher de la famille Guérin : installation aux Buissonnets en 1877 (Thérèse a 4 ans), o Le milieu :

Petite bourgeoisie catholique. Louis est horloger-bijoutier, Zélie denteiière.

2. Quelques "éclats" ou facettes de ce Diamant lumineux qu'est la Famille Martin

a.  Héritage et transmission :

Evidente si l'on considère Thérèse et ses soeurs, en découvrant leur milieu familial, écrin de sainteté.

Par la médiation de "personnes ressources"

(spécialement pour Zélie), et par l'Amour divin : Zélie a puisé dans le Cœur de Dieu, dans la prière, et aussi dans l'amour de son mari, l'affection, la tendresse, qu'elle n'avait pas reçu elle-même (surtout de sa mère). Et elle y a mis toute sa volonté, dans un choix d e vie délibéré !

b.   Le discernement de la vocation, et plus généralement, de la Volonté divine :

Dès leur jeunesse, ils brûlent d'un tel désir de Dieu qu'ils se croient appelés à la vie consacrée. Louis chez les chanoines du Grand-Saint-Bernard, et Zélie chez les Sœurs de la Charité. Mais le Seigneur, à travers obstacles (le latin) mais surtout les soutiens spirituels auxquels ils se confient totalement, leur fait découvrir le Mariage comme chemin de Sainteté : ils se marient le 13 juillet 1858.

Il en est de même pour la découverte de la beauté de l'amour humain dans toutes ses dimensions, comme partie intégrante du Mariage, du Don de soi : grâce au père spirituel de Louis, iis s'ouvrent au don de la vie, 8 mois après les noces : le temps d'une gestation ? Des fiançailles intégrées au mariage? Importance de rappeler la nécessité de vraies FIANÇAILLES chrétiennes aux jeunes (à temps et à contre-temps) comme chemin de découverte (la parole précède l'acte) en profondeur, et donc de réussite de l'alliance et de ses fruits (les enfants) : bénédiction ! (ou pas). Sans jugement, avec la proposition ultérieure de la miséricorde certes.

c.    Un couple aimant et fécond pour le Royaume :

Ils représentent et manifestent l'unité de l'amour dont parle Benoît XVI dans l'Encyclique "Deus Caritas est" : agapè, philia, eros, un unique Amour sorti du Coeur de Dieu. Ils vivent l'amour conjugal, l'amitié, la confiance, la tendresse, le respect, l'admiration, la complicité, comme en témoignent leurs lettres.

"Je t'embrasse de tout mon cœur, écrit Zélie à Louis, je suis si heureuse aujourd'hui à la pensée de te revoir, que je ne puis travailler. Ta femme qui t'aime plus que sa vie".

"Chère Amie, écrit Louis à Zélie, le temps me paraît long, il me tarde d'être près de toi. Ton mari et vrai ami qui t'aime pour la vie". La fécondité : 9 enfants, dont 4 décèdent en bas âge. Ils désirent recevoir et élever leurs enfants "pour le Ciel", et leur apprennent donc, comme le dira Thérèse, "à vivre d'amour". L'accueil de la vie est pour eux une évidence, un don de Dieu. Ils sont totalement étrangers à la "mentalité contraceptive" répandue aujourd'hui (même chez les chrétiens) : à distinguer de la "paternité et maternité responsable" qui est là encore est un chemin exigeant de sainteté, de respect de l'autre en tout son être. Importance de la formation des couples aux Méthodes naturelles de régulation des naissances (MAO du Cler, Billings). Vraies bénédictions pour les enfants ! La manière dont un enfant est conçu n'est pas anodine !!

A travers la perte de 4 petits enfants, ils apprennent à vivre la Communion des Saints.

d. Une famille "heureuse" (selon les Béatitudes)... et blessée. Epreuves et souffrances ;

L'éducation des enfants, chemin de joie, de croissance mais aussi de difficultés.

Le "cas" Léonie, un chemin d'épreuve et de sainteté : maltraitance, adolescence difficile, difficulté à trouver sa place, sa vocation... Qu'elle finit par trouver, en vivant en disciple de sa sœur Thérèse, la Petite Voie d'humilité.

La maladie de Zélie (cancer), le veuvage de Louis, sa maladie dégénérative, avec l'internement au Bon Pasteur de Caen.

L'OFFRANDE DE SOI (source de l'acte d'offrande de Thérèse) : "faire de sa vie une Messe dont nous sommes /'hostie" (Marthe Robin). Louis et Zélie ont vécu leurs épreuves de santé en union explicite avec la Passion du Christ.

La vie dans la CONFIANCE, l'abandon, le Don : Quand je pense à ce que le bon Dieu, en qui j'ai mis toute ma confiance et entre les mains de qui j'ai remis le soin de mes affaires, a fait pour moi et mon mari, je ne puis douter que sa divine Providence veille avec un soin particulier sur ses enfants" écrit Zélie Martin. Et aussi : "Moi, je sais que le Bon Dieu s'occupe de moi, je m'en suis aperçue bien des fois dans ma vie et combien j'ai de souvenirs à ce sujet, qui ne s'effaceront jamais de ma mémoire" (capacité de relecture spirituelle = faire mémoire).

e.   "Dieu premier servi" :

Selon la devise familiale reprise de ste Jeanne d'Arc. "Dieu ou rien" ! La prière, dans une grande radicalité évangélique.

Ils se donnent les moyens de la fidélité et de la sainteté !

"Oui, j'ai un but, et ce but, c'est d'aimer Dieu de tout mon cœur" confesse Louis Martin.

f.    Le rayonnement missionnaire :

Engagement quotidien (familial, professionnel et social) fondé sur le Christ : partis de rien, Louis et Zélie finissent à ia tête d'une belle entreprise de dentelle en point d'Alençon pour laquelle ils ont travaillé comme des forçats. Louis a revendu son horloger-bijouterie pour s'y consacrer. Ils travaillent en chrétiens à la pointe de la doctrine sociale de l'Eglise, en privilégiant toujours le service de Dieu et le bien de leurs employés, et donnant largement aux pauvres et à l'Eglise. ' 'Iis ont servi Dieu dans le pauvre, non par simple élan de générosité, ni par justice sociale, mais simplement parce que le pauvre est Jésus" (cardinal Martins). Mais aussi témoignage évangélique explicite.

Attention aux autres, au voisinage, à l'injustice et à la maltraitance qu'ils ne craignent pas de chercher à résoudre : exemple de l'intervention vis à vis des 2 fausses religieuses (enfant "enlevée" à sa mère comme source de revenu). Scandale, commissariat, retournement...

Ainsi, ils sont devenus un "modèle exemplaire de foyer missionnaire", selon l'expression du cardinal Martins (Messe de béatification). D'où le choix de la Journée Mondiale des Missions pour célébrer cette béatification. Les époux Martin donnaient aussi largement à l'Œuvre de la Propagation de la Foi, et désiraient par ailleurs avoir un fils missionnaire et des filles religieuses. Ce qui ne signifie par que ce don radical ait été facile !

3. En conclusion :

Ils nous montrent et nous rappellent ce qu'est une vraie famille "selon le Cœur de Dieu", ce qu'est la Famille chrétienne. Notre chemin de miséricorde et de sainteté pour tous.

Et le Pape François pour conclure (Homélie de la Canonisation) :

Les saints époux Louis Martin et Marie Azélie Guérin ont vécu le service chrétien dans la famille, construisant jour après jour une atmosphère pleine de foi et d'amour ; et dans ce climat ont germé les vocations de leurs filles, parmi lesquelles sainte Thérèse de l'Enfant-Jésus.